La Colline du Temple à Jérusalem :
objet de conflits
Bonnes Nouvelles : Brièvement, selon vous, pourquoi Jérusalem occupe-t-elle une place si importante dans la Bible ?
Leen Ritmeyer : Jérusalem a été choisie par Dieu. Dès l'époque d'Abraham, quand l'Éternel dit à ce dernier d'aller au mont Morija [qui allait devenir plus tard la Colline du Temple] et d'y sacrifier son fils Isaac - préfiguration du sacrifice plus excellent devant être fait plus tard en la personne du Christ crucifié. Par la suite, Dieu dit à Moïse que lorsque lui et le peuple arriveraient dans le pays, il y aurait « un lieu » que l'Éternel choisirait « pour y faire résider Son nom » (Deutéronome 12:11). Par conséquent, c'est le seul endroit au monde que Dieu a choisi « pour y faire résider Son nom ».
« Sous le prétexte de rénovations, ils détruisent ou dissimulent des vestiges du temple juif, niant toute présence juive sur la Colline du temple, dans l'histoire ».
Plus tard, David y érigea le premier autel, et Salomon y bâtit le temple. Ce lieu devint un site de culte clef où tous les Israélites devaient s'assembler trois fois par an pour les grandes fêtes comme la Pâque, la fête des Semaines, et la fête des Tabernacles. C'était leur seul site cultuel.
BN : Jérusalem passe pour sacrée aux yeux des trois grandes religions monothéistes, le judaïsme, le christianisme et l'islam. Quand et comment est-elle devenue l'un des lieux saints de l'islam ?
LR : Elle l'est devenue au VIIe siècle, quand le calife Omar vint en Israël. À cette époque-là, les musulmans conquirent tout le Moyen-Orient et une partie de l'Europe.
Ces derniers avaient deux lieux saints principaux - La Mecque et Médine - qui avaient été établis par le prophète Mahomet. Quand Jérusalem fut conquise par le calife Omar, toutes sortes de légendes se mirent à circuler. Il voulut savoir où se trouvait le lieu très saint du temple juif. On se mit à raconter, par la suite, que quand Mahomet était venu à Jérusalem, il y était monté au ciel à cheval. Un troisième lieu saint islamique fut choisi à partir de cette légende, pour commémorer l'ascension du prophète Mahomet.
Au début, tous les musulmans en prière se prosternaient en direction de Jérusalem, mais cette pratique fut plus tard modifiée, et ils se mirent à prier en se tournant vers la Mecque. La Coupole du Rocher fut construite vers l'an 700 de notre ère, et la mosquée d'Al Aqsa fut ajoutée par la suite à la Colline du Temple. Plusieurs rénovations ont été effectuées, mais ces édifices n'ont pratiquement pas été modifiés.
BN : Par la suite, pendant longtemps, Jérusalem cessa d'être importante aux yeux des musulmans. Comment se fait-il qu'elle le soit redevenue ?
LR : Elle était devenue le sous-fifre de la Mecque et de Médine, mais depuis que l'État d'Israël a été créé, le conflit entre Juifs et Arabes n'a cessé de s'aggraver. La Colline du Temple, le troisième lieu saint des musulmans, est aussi le seul lieu saint pour le peuple juif.
Évidemment, d'après la Bible, et même selon l'archéologie, les Juifs s'y trouvaient bien avant les Musulmans. Ces derniers, bien qu'étant minoritaires dans le pays, revendiquent la Terre Sainte comme étant la leur - non seulement la Colline du Temple, mais toute la terre d'Israël. La revendication des Juifs remonte à une époque bien plus reculée, aux temps bibliques, mais cela, les musulmans le nient. Ces derniers prétendent qu'elle leur appartient depuis 1300 ans, et que personne n'a le droit de la leur prendre.
La Colline du Temple se situe de plus en plus au noeud du problème. Les travaux que les musulmans entreprennent actuellement sur la Colline du Temple ont pour objet d'asseoir leur mainmise sur les lieux. Ils convertissent en mosquées d'anciennes structures comme la Porte Dorée [un portique construit par le roi Hérode ] et les étables de Salomon, une grande esplanade datant des Hérodiens et de l'époque des croisades, et considérée de par le passé comme ayant été bâties par Salomon.
Sous le prétexte de rénovations, ils détruisent ou dissimulent des vestiges du temple juif, niant toute présence juive sur la Colline du Temple, dans l'histoire.
BN : Certaines autorités musulmanes n'ont-elles pas, de par le passé, reconnu que c'est à cet endroit que se trouvait jadis le temple de Salomon ?
LR : Bien sûr ! C'est d'ailleurs pour cette raison que cet endroit avait été choisi comme site pour la Coupole du Rocher ; Le calife Omar avait demandé où le temple s'était dressé, afin de pouvoir bâtir un lieu saint au même endroit pour y commémorer l'ascension de Mahomet.
BN : Comment se fait-il que les Musulmans contrôlent à présent le sommet de la Colline du Temple, tandis que les Israéliens contrôlent le restant de Jérusalem, alentour ?
LR : La vieille ville, y compris la Colline du Temple, a été prise par les Israéliens venus de Jordanie, en 1967. Dans les rangs israéliens, on parlait alors de détruire les mosquées et de rebâtir le temple. Mais le gouvernement israélien craignait qu'un tel acte ne déclenche de graves représailles au niveau international.
Les Israéliens contrôlent donc la vieille ville, et laissent les Musulmans contrôler la Colline du Temple. Ce qui ne veut pas dire que ces derniers aient le droit d'y bâtir ce qu'ils veulent. Les Israéliens leur permettent d'y adorer, d'y pratiquer la liberté religieuse et d'accéder à leurs sites sacrés, bien que les Musulmans aient, ces dernières années, fermé la Colline du Temple aux non-musulmans, peu respectueux des accords passés.
Évidemment, toute la vieille ville est un site archéologique. Personne n'a le droit, d'après la loi, de creuser sans la surveillance d'archéologues. Mais les Musulmans bravent cette loi depuis plusieurs années, avec les travaux qu'ils effectuent sur ce site.
BN : Que se passe-t-il, depuis quelque temps, sur la Colline du Temple, du point de vue archéologique ?
LR : Depuis quelques années, on s'intéresse, semble-t-il, à l'emplacement des étables de Salomon. C'est une énorme structure souterraine contenant des artefacts de l'époque des croisés, de celle des Musulmans, et de celle d'Hérode dont certains remontent à 2 000 ans.
Les Musulmans, afin de mieux insister sur leur revendication cultuelle de la Colline du Temple, se servent à présent de ces bâtiments sous-terrains comme lieux de culte - notamment les étables de Salomon. Ces édifices sous-terrains sont ouverts depuis longtemps, et ils ont décidé récemment d'en faire une mosquée. Le problème, c'est que ledit emplacement sousterrain, qui peut recevoir 10 000 fidèles, n'est accessible que par un escalier étroit. S'il s'y passait quelque chose, les personnes se trouvant à l'intérieur ne pourraient pas toutes sortir ; par conséquent, ils ont besoin d'une autre entrée, nettement plus large, pour accéder à cette grande salle souterraine.
Sachant qu'il leur serait impossible d'obtenir la permission de construire une autre entrée, ils se sont mis à creuser, de nuit, un trou de 13 m x 13 m et de 10 m de profondeur. Ils ont apporté des bulldozers et ont extrait des camions entiers de terre et de cailloux afin de pouvoir bâtir un escalier menant au hall.
Ce faisant, ils ont non seulement détruit beaucoup d'artefacts, mais - à en juger par les pierres qu'ils ont enlevées du trou, une grande muraille a aussi été détruite. À mon avis, ce mur avait été construit par le roi Ézéchias vers 700 avant notre ère.
De gros dégâts ont donc été causés par ces travaux. Les archéologues ne protestent généralement pas si les découvertes faites lors de fouilles sont enregistrées, mais quand on apporte des bulldozers et que tout est détruit, c'est une autre affaire. Parmi les débris déversés dans une vallée proche, de très beaux fragments de portiques provenant du temple d'Hérode ont été trouvés. Et bien que l'on puisse les photographier et les nomenclaturer, on ignore où ils se trouvaient.
Un grand nombre de pierres de taille énormes ont été trouvées dans une décharge, et depuis ont disparu. Elles semblaient avoir appartenu à d'importants bâtiments juifs. Aussitôt que le trou a été creusé, ils ont recouvert tous les anciens vestiges, de sorte qu'il est impossible de savoir ce qu'ils ont détruit. Certaines pierres ont aussi été retaillées et réutilisées pour des parterres.
C'est triste, mais en dépit de toutes les protestations de nombreux archéologues et de toutes les pétitions envoyées au gouvernement, rien n'a été fait pour interrompre ce saccage.
BN : Dans le cas présent, on a donc cherché - du moins en partie - à effacer des preuves d'une présence juive sur la Colline du Temple ?
LR : Précisément ! On sait, par exemple, qu'à partir d'enquêtes antérieures dans les étables de Salomon, il existe une arche ancienne et beaucoup de pierres hérodiennes.
À l'intérieur, et à l'angle sud-est, se trouvent des vestiges de fenêtres hérodiennes qui appartenaient à une tour. Et dans le mur septentrional se trouve une pierre hérodienne joliment décorée de ceps et de motifs géométriques. Que sont-elles devenues ? On l'ignore.
BN : Que représente la Colline du Temple aux yeux des Juifs pratiquants ?
LR : Pour la plupart d'entre eux, c'est le seul endroit où ils peuvent adorer Dieu selon les lois mosaïques. Les Israéliens, dans l'ensemble, n'ont que faire de la Colline du Temple, et ils repoussent l'idée d'avoir des sacrifices d'animaux. Il y a aussi beaucoup de Juifs religieux qui savent qu'ils ne peuvent pas réellement adorer Dieu selon les lois mosaïques tant qu'ils n'ont pas de temple.
« J'estime avoir réussi à prouver que les tranchées creusées pour les fondations du mur du saint des saints du temple de Salomon subsistent encore sur le roc, à l'intérieur de la Coupole du Rocher ».
Deux organismes - les Fidèles de la Colline du Temple et l'Institut du Temple - essaient désespérément d'instaurer un culte sur la Colline du Temple. Ils confectionnent les vêtements des sacrificateurs, tous les ustensiles d'or et d'argent, les trompettes d'argent et le chandelier d'or. Ils sont prêts à adorer en ce lieu dès demain ! Évidemment, ils ont d'abord besoin d'un autel.
Pour le moment, ils n'ont pas le droit d'ériger un autel ou un édifice quelconque. Ils souhaitent, tout compte fait, bâtir un temple. Cela a causé de grosses difficultés car la Coupole du Rocher se dresse à l'emplacement de l'ancien temple juif.
Ils savent qu'ils ne peuvent pas bâtir un temple tout seuls. Néanmoins, tout comme à l'époque du retour d'exile de Babylone, quand Zorobabel et Josué bâtirent un autel, ils veulent maintenant ériger un autel, d'avis que dès qu'ils le feront et commenceront à faire des sacrifices, le Messie viendra et les aidera à bâtir leur temple.
Chaque année, ils essaient d'apporter une pierre angulaire à la Colline du Temple, pour adorer. Ils essaient aussi de pratiquer d'anciens rituels. Il y a quelques années, ils ont fait un sacrifice pascal sur la colline de Sion. Ces gens-là souhaitent désespérément commencer à adorer Dieu d'après leurs convictions.
BN : Ils pourraient donc commencer à faire des sacrifices en l'absence d'un temple, pour autant qu'ils aient un autel ?
LR : Précisément ! L'autel précède toujours le temple. Noé érigea un autel. Abraham érigea un autel. David de même. Le temple venait ensuite. Le temple fut construit pour abriter l'arche de l'Alliance. Ils n'ont pas cette arche, mais ils sont convaincus qu'en faisant des sacrifices, cela les mettra en rapport avec Dieu.
L'autel est donc la première chose qu'ils veulent bâtir. En ce qui les concerne, ils ne peuvent le faire qu'à l'emplacement de l'autel original. Ils croient que l'autel construit par Hérode le Grand, et détruit en l'an 70 de notre ère, se dressait là même où l'autel de Salomon s'était tenu, c'est- à-dire là où les autels de David et d'Abraham se trouvaient. J'ai réussi à déterminer l'endroit exact où il se trouvait ; il se dressait à l'est de la Coupole du Rocher.
BN : Leurs conclusions à propos de l'emplacement du temple s'accordent-elles avec les vôtres ?
LR : Oui ! Il y a des années que je fais des recherches dans ce sens, et j'estime avoir réussi à prouver que les tranchées creusées pour les fondations du mur du saint des saints du temple de Salomon subsistent encore sur le roc, à l'intérieur de la Coupole du Rocher. La majorité des archéologues partage cette opinion. Après avoir localisé le lieu très saint, qui est un carré de 20 coudées, en plein centre on peut voir l'encoche que Salomon dut creuser pour y placer, de niveau, l'Arche de l'Alliance. Cette dernière devait être placée horizontalement. Ces encoches dans le roc existent encore aujourd'hui.
D'autres opinions ont aussi été avancées, qui placeraient le temple au nord ou au sud de la Coupole du Rocher. À mon avis, ces idées sont motivées par le désir de bâtir un temple sans avoir à détruire la Coupole du Rocher, destruction qui déclencherait la Troisième Guerre mondiale ! Ces emplacements, la majorité des archéologues ne les acceptent pas pour véridiques, pas plus que la communauté religieuse juive. Ils croient que le temple se tenait là où la Coupole du Rocher se dresse à présent, et ils ne bâtiront pas de temple ailleurs.
D'un point de vue chrétien, si vous pensez que nous vivons dans les derniers jours et qu'il est fort possible que les Juifs y rebâtissent l'autel des holocaustes, il va falloir que les Musulmans et les Juifs se mettent d'accord pour essayer d'instaurer la paix dans cette terre déchirée.
Lorsqu'il est question, de l'alliance et des sacrifices dans les chapitres 11 et 12 de Daniel, il est fort possible que les Juifs obtiennent la permission d'ériger un autel et d'immoler à nouveau des sacrifices, peu avant le retour du Messie. L'avenir le dira.