Charles Darwin :
son cheminement et l'« évolution » de ses idées
D'ici à quelques mois, on fêtera le bicentenaire de la naissance de Charles Darwin et d'Abraham Lincoln, tous les deux nés le 12 février 1809, et le 150e anniversaire de la publication de L'Origine des espèces. De nombreuses célébrations auront lieu, en souvenir de ces deux personnages influents dans l'histoire du monde.
Abraham Lincoln, le 16e président des Etats-Unis, est surtout connu pour trois réalisations importantes : sa proclamation d'émancipation des esclaves américains ; ses efforts en vue de préserver l'unité des Etats- Unis ravagés par la guerre civile ; et ses actions qui en ont fait l'un des dirigeants les plus humains et les plus respectés de ces derniers siècles.
Néanmoins, des deux, Charles Darwin est celui qui a le plus influencé le monde au niveau social, psychologique, politique et scientifique. Les idées issues de la théorie darwinienne de l'Évolution saturent encore la plupart des disciplines scientifiques et les écoles de pensées philosophiques présentées dans les écoles, les universités et la presse populaire. Il y a quelques mois, une chaîne de télévision scientifique a qualifié la théorie darwinienne de l'Évolution de « plus importante des cent plus grandes découvertes scientifiques de tous les temps ».
« Un mystère inéluctable pèsera toujours sur l'origine de la théorie de la sélection naturelle, de même qu'un voile indéfinissable pèsera toujours sur le vrai Charles Darwin »
Qui, au juste, était Charles Darwin ? Pourquoi sa théorie de l'Évolution a-t-elle eu un tel impact ? Ce qu'il disait était-il juste ?
On a beaucoup parlé de lui, mais sans doute sa vie est-elle traitée de manière plus détaillée dans deux oeuvres (pro évolutionnistes) récentes intitulées Darwin : The Life of a Tormented Evolutionist (1992), par Adrian Desmond et James Moore, et les deux tomes Charles Darwin : Voyaging (1995) et Charles Darwin : The Power of Place (2002) par le Pr Janet Brown, de Harvard. En plus de ces deux biographies, Darwin rédigea sa propre autobiographie, et son fils Francis écrivit lui aussi un livre sur sa vie.
À l'opposé, parmi les ouvrages contre Darwin et sa théorie, on compte le brillant exposé Evolution : A Theory in Crisis (1985), par le biochimiste et physicien Michael Denton, et Darwin on Trial (1991) par le professeur de droit, Phillip Johnson, de l'Université de Californie, pour n'en citer que quelques-uns. Plusieurs informations, dans le présent article, sont tirées de ces sources.
La jeunesse de Darwin
On suppose généralement que Darwin est l'auteur de la théorie de l'Évolution. Or, le concept évolutionniste date de la Grèce antique. On doit à Darwin l'idée d'un mécanisme permettant d'expliquer ladite théorie : la sélection naturelle.
Robert et Erasmus (le père et le grand-père de Charles) furent les deux êtres les plus influents dans sa jeunesse. Bien qu'Érasmus soit décédé avant la naissance de Charles, Robert fit en sorte que son fils étudie les écrits de son grand-père sur l'Évolution.
Erasmus Darwin, en effet, avait écrit un livre intitulé Zoonomia, qui contenait bon nombre d'idées évolutionnistes que Charles allait adopter par la suite. Erasmus avait réussi en tant que médecin, ainsi que son fils Robert, et tous les deux étaient contre le christianisme, bien qu'ils se soient bien gardés de le révéler au public. « Le nom de Darwin, ont écrit Desmond et Moore, était déjà lié à l'athéisme subversif. Le Dr Robert était luimême un libre-penseur de placard… » (p. 12)
Charles Darwin finit par rejeter le christianisme, en partie parce qu'il ne pouvait accepter le sort réservé selon lui aux incroyants comme son grand-père, son père, son frère aîné et lui-même. Il écrivit dans son autobiographie : « L'incrédulité m'envahit peu à peu, d'abord lentement, puis totalement. Ce [processus] a été si imperceptible que je ne m'en suis pas inquiété, et, par la suite, je n'ai jamais douté du bien fondé de ma décision.
« En effet, je peux difficilement concevoir que l'on puisse souhaiter que le christianisme ait raison ; car si c'était le cas, il semble bien, selon le texte, que les incrédules, y compris mon père, mon frère et presque tous mes meilleurs amis subiront un châtiment éternel. Il s'agit là d'une doctrine maudite » (édition électronique).
Hélas, Darwin était influencé par une optique erronée bien que fort répandue de la vraie doctrine chrétienne (pour de plus amples détails à ce sujet, lire notre brochure gratuite intitulée « Qu'arrive-t-il après la mort ? »)
Darwin perdit sa mère à l'âge de 8 ans. Il suivit les voies sans retenue de libre penseur de son père et de son défunt grand-père. Il écrivit dans son autobiographie : « Je dois admettre qu'étant jeune garçon, il m'était amplement permis d'inventer délibérément des faussetés, et que cela se faisait toujours pour le compte de l'effervescence provoquée » (C'est nous qui soulignons).
« Il voulait se faire remarquer, être loué », ajoutent Desmond et Moore. « Tout ce qu'il faisait en classe, il le faisait pour le simple plaisir que lui procurait l'attention et la surprise que cela engendrait, et ses mensonges élaborés lui faisaient plaisir, comme une tragédie ». Il racontait des histoires à dormir debout à propos d'histoire naturelle… Un jour, il inventa une histoire compliquée pour montrer à quel point il aimait [démontrer sa vérité]. C'était sa manière de garçon de manipuler les gens » (p. 13).
« Il disait souvent des mensonges, prétendant avoir vu des oiseaux rares, confirme Janet Brown. Ces mensonges ne s'accompagnaient jamais du moindre sentiment de honte…Soyons francs : ils reflétaient un besoin d'attirer l'attention. Il voulait être admiré… Les mensonges et les sensations fortes les accompagnant étaient pour lui indissociables des délices de l'histoire naturelle » (Charles Darwin : Voyaging, p 13-14).
Comme nous allons le voir, ces tendances à raconter des histoires intéressantes mais imaginaires et ce goût pour la dissimulation de secrets allaient, hélas, ressurgir plus tard dans sa vie d'adulte. Comme le fait remarquer un biographe : « Un mystère inéluctable pèsera toujours sur l'origine de la théorie de la sélection naturelle, de même qu'un voile indéfinissable pèsera toujours sur le vrai Charles Darwin » (Loren Eiseley, Darwin and the Mysterious Mr X, 1979, p. 93).
En classe, Darwin n'était pas très bon élève. Et quand il abandonna ses études de médecine, son riche père l'envoya à Cambridge, espérant le voir réussir en quelque chose.
Dans son autobiographie, il admet : « Quand j'abandonnai les études, je n'étais, pour mon âge, ni bon ni mauvais en classe. Je crois que, pour mes maîtres et pour mon père, je passais pour un garçon très ordinaire, d'une intelligence au-dessous de la moyenne. Mon père me dit un jour : « Tu ne penses qu'à tirer, qu'à attraper des chiens et des rats, tu te déshonoreras et fera honte à ta famille ».
Autour du globe, sur le Beagle
Son père, bien que rejetant le christianisme, estimait préférable que son fils indiscipliné et insouciant vive l'existence d'un pasteur rural car il pourrait ainsi faire ce qui l'intéressait en histoire naturelle.
En fait, Darwin reçut son diplôme en théologie et, pour un temps, adopta l'Écriture. Mais avant de décrocher un poste dans le clergé, on lui offrit une couchette sur le vaisseau HMS Beagle, et on lui proposa de s'asseoir à la table du capitaine lors des repas, pour lui tenir compagnie. Il n'était pas le naturaliste de bord ; ce poste fut confié au chirurgien du bateau. Ce voyage de cinq ans autour du monde allait avoir un profond impact sur sa vie et sur ses convictions.
Quatre expériences particulières façonnèrent sa vie. La première : son voyage. Il se mit à se fasciner pour l'histoire naturelle et la géologie, et ce grand amour allait durer toute sa vie.
La seconde : Son contact avec le christianisme, sa constatation de la bigoterie du capitaine du Beagle, Robert FitzRoy, le poussa à rejeter la religion.
La troisième : Sa lecture des ouvrages de Charles Lyell sur la géologie, dans lesquels l'auteur affirmait que notre planète est vieille de plusieurs millions d'années ; sa foi en la Bible en fut ébranlée, et l'envie lui passa de faire carrière dans le clergé.
La quatrième : Sa perplexité face à l'infinie variété des créatures qu'il observa, notamment aux îles Galápagos. Il se demanda comment ces espèces différentes pouvaient bien s'accorder avec les récits de son temps évoquant la Création.
De retour en Angleterre, las de son long et périlleux voyage, il se promit de ne plus jamais voguer sur un bateau à voile. Il allait dorénavant passer le plus gros de son temps chez lui et dans les environs, à Downe, ou à Londres.
À 29 ans, il épousa sa cousine Emma, et l'on eut dit qu'il se préparait à vivre comme un aristocrate anglais typique, vivant confortablement de l'argent de son riche père, entouré d'une cohorte de cuisiniers, de serviteurs, de majordomes et de jardiniers. Il ne travailla jamais pour personne et disposait de toutes les richesses et du temps voulus pour n'agir qu'à sa guise.
Des idées contraires sur la sélection naturelle
Il consacra sa vie à l'étude de la nature, espérant bien se faire un nom comme naturaliste.
À la lecture du livre de Thomas Malthus, Essai sur le principe de Population, il fut frappé par la similitude entre la lutte compétitive de l'homme pour les ressources limitées, et, dans la nature la lutte continuelle pour survivre. Cela fit germer dans son esprit l'idée d'une éventuelle évolution, d'une sélection naturelle et d'une survie du plus fort. « À ce stade, au moins, j'avais une théorie sur laquelle travailler », écrivit-il.
Dans l'esprit de Darwin, des mutations génétiques au hasard donneraient à certains nouveaux-nés des avantages physiques sur les autres. Ces créatures plus fortes auraient la prééminence dans les luttes avec les conditions de l'environnement, et entre elles, pouvant ainsi se reproduire en plus grand nombre, transmettant leur avantage génétique à la génération suivante. Darwin imagina qu'au bout de nombreuses générations, cela donnerait naissance à des espèces totalement différentes, d'où la formidable diversité de la flore et de la faune existantes.
En réfléchissant à l'Évolution – appelée alors transmutation – Darwin se mit à douter de la nécessité de la présence d'un Dieu créateur.
Craignant de divulguer ses idées radicales, il se mit à rédiger des carnets de notes, gardant le secret sur ce sujet. Pour un gentilhomme de la campagne, marié à une chrétienne et ayant beaucoup d'amis chrétiens, il souhaitait garder pour lui ses idées hérétiques. Il déclara par la suite qu'elles lui donnaient le sentiment de « confesser un meurtre ».
Il dissimula donc habilement ses idées et se servit de nombreux euphémismes. Comme l'ont écrit Desmond et Moore, « Il se mit à inventer des moyens de dissimuler son matérialisme. » « N'en parle pas, se dit-il ; contente- toi de parler de comportement mental hérité : Pour éviter de révéler à quel point je crois au matérialisme, s'empressait-il de gribouiller, fais seulement allusion aux émotions, aux instincts, aux degrés de talents, qui sont héréditaires (sic)… » Il apprenait à soigneusement peser ses mots (p. 259).
En revanche, dans ses carnets tenus secrets, il était assez candide pour écrire : « Que tu es matérialiste ! » Dans la terminologie de l'époque, cela décrivait quelqu'un croyant qu'il n'existe que de la matière dans l'univers, et que cet univers strictement matériel est gouverné par des lois physiques, sans que la présence d'un Créateur soit nécessaire.
Malheureusement, en essayant de vivre de manière respectable, très normale en apparence, sa conscience se mit à le déchirer du fait de ses idées choquantes. Et Desmond et Moore de poursuivre : « Dès lors, en profondeur dans son oeuvre clandestine, à amasser des notes de nature à choquer ses compatriotes géologues, sa santé se mit à se détériorer. Il vivait une double vie, faisant deux poids deux mesures, incapable d'aborder ses travaux sur les espèces avec qui que ce soit… par crainte de passer pour irresponsable, profane, ou pire » (p. 233).
Deux décès accablants dans la famille
Il reçut ensuite deux chocs dévastateurs pour sa jeune famille. D'après la biographe Janet Browne, le décès, à l'âge de dix ans de sa fille tant aimée Annie, suivi un an plus tard par celui de son premier fils William, l'aigrit considérablement envers Dieu. « Ce décès marquait le début de la dissociation consciente de Darwin envers le Dieu traditionnel… La morosité s'installa. L'engourdissement progressif de ses sentiments religieux… et le monde profane de sélection naturelle qu'il continuait à créer s'entrechoquèrent implacablement avec le vide causé par les deuils successifs » (p. 503).
Or, nous pourrions dire, ce qui était ironique c'était que Darwin était victime de sa propre théorie concernant la sélection naturelle, du fait des dangers génétiques liés aux unions consanguines.
En 1839, il avait épousé sa cousine Emma. Déjà, à plusieurs reprises, les deux familles avaient eu des mariages entre proches, une tendance dangereuse en matière d'hérédité. Vingt-six enfants naquirent de ces mariages entre cousins ; 19 d'entre eux étaient stériles, et 5 moururent prématurément, y compris la fille et le premier garçon de Darwin. Bon nombre d'entre eux étaient handicapés mentaux ou souffraient d'autres maladies héréditaires, comme c'était le cas pour son dernier fils. Toutes ces situations provoquèrent [chez Darwin] une grande hostilité à l'égard d'un Dieu capable d'intervenir.
« Un aumônier du diable »
À ce stade, Darwin se débattait avec l'idée de publier sa théorie, craignant d'être mis à l'écart. Moore écrit : « La pression devint évidente… Dans une lettre, Darwin… laissa échapper : Quel livre un aumônier du diable peut-il écrire à propos des oeuvres maladroites, inutiles, basses comme des gaffes et horriblement cruelles de la nature ! « C'était par un livre, révélant son manque de foi, que Darwin craignait d'être accusé et exposé à un châtiment comme l'aumônier original du diable, le révérend Robert Taylor, le diplômé de Cambridge et prêtre apostat jeté en prison à deux reprises pour blasphème ». (Darwin - A Devil's Chaplain ? édition électronique en ligne).
Il finit par écrire ce qu'il appela lui-même son « maudit livre », mais la plupart de ses écrits demeurèrent secrets pendant 20 ans. Ce n'est que lorsqu'un collègue, Alfred Russel Wallace, lui eut envoyé un article proposant essentiellement la même théorie, qu'il se sentit poussé à agir. Craignant que Wallace ne passe pour l'auteur de cette dernière, Darwin lut d'abord son propre article, puis celui de Wallace, lors d'une réunion d'experts scientifiques.
Depuis le moment où il commença à écrire ses carnets secrets de notes sur l'Évolution et le matérialisme, il fut, une grande partie de sa longue vie, en proie à de terribles désordres psychosomatiques. Il fut, pendant 40 ans, la plupart du temps en mauvaise santé.
Non seulement il souffrit de maux apparemment provoqués par son état psychologique, mais il fut en outre envahi de doutes à propos de son propre livre. Il confia à plusieurs collègues savants : « Il ne s'agit que d'un simple chiffon d'une hypothèse contenant autant de déficiences et de trous que de parties logiques… [mais] je puis y porter mon fruit à vendre… Il est préférable d'avoir un pauvre chiffon à vendre comme fruit, que de ne rien avoir ». Il déclara à un autre collègue : « J'ai consacré ma vie à un fantasme (sic) » (cité par Desmond et Moore, p. 475- 477).
Le fruit qu'il cherchait à vendre, c'était, évidemment, sa théorie de l'Evolution, laquelle comportait une attaque directe des notions prévalentes sur Dieu, le christianisme et la Bible. Et quel fruit empoisonné !
Comme l'expliquent Desmond et Moore, « Atteignant le comble du radicalisme, Darwin en mesura les conséquences cataclysmiques. Dès que l'on part du principe que les espèces… peuvent s'entrecouper… tout l'édifice vacille et s'écroule. Sa cible, c'était « l'édifice » de la Création avec tout ce qui y touche. Il plongeait les regards dans l'avenir, et voyait l'édifice miraculeux s'écrouler » (p. 243).
Arrivant au bon moment
Bien que Darwin soit déchiré par le doute, ses idées arrivèrent à un moment « opportun ». Cette période de l'histoire était fortement influencée par la Révolution française, par le renversement de plusieurs monarchies et par la perte de pouvoir du clergé européen. Dans son autobiographie, Darwin a écrit : « Rien n'est plus remarquable que la prolifération du scepticisme ou du rationalisme pendant la seconde moitié de ma vie ».
Il put exploiter les courants politiques et sociaux radicaux présents dans la société qui l'entourait. On vivait l'avènement de l'ère de l'optimisme ; la science, prometteuse, allait conduire à une époque de progrès scientifiques et matériels constants étant en mesure d'élucider toutes les questions posées par l'homme et de résoudre tous ses problèmes sans avoir recours à la religion. C'était une époque où les églises passaient, aux yeux des radicaux comme Darwin, pour corrompues et désuètes.
Darwin proposait une théorie qui, en somme, pour bien des gens, éliminait le besoin d'un Dieu Créateur, avec seulement des mécanismes physiques fonctionnant au hasard, la sélection naturelle et l'adaptation se chargeant de la création. « Sa vision, expliquent Desmond et Moore, cessait d'en être une soutenue personnellement par un Dieu patricien mais engendrée par lui-même. Des échinodermes (créatures marines telles que l'étoile de mer), tout avait surgi grâce à une redistribution légitime de matière vivante du fait d'un environnement géologique ordonné et changeant » (p. 237).
Il importe de noter que dans les versions plus tardives de l'Origine des espèces, Darwin ajoute le terme « Créateur » à plusieurs endroits et que dans sa conclusion, à un moment donné, il déclare : « Il y a une majesté dans cette optique de la vie, avec ses divers pouvoirs, ayant été insufflée à l'origine par le Créateur, dans quelques formes ou dans une seule ». Néanmoins, il confessa plus tard à ses collègues outrés [par une telle mention] que cette mention d'une évolution théiste ou divine avait pour objet d'adoucir les sentiments de sa femme chrétienne et du public partageant l'opinion de son épouse.
Néanmoins, Darwin admit changer d'idées et prétendit être agnostique. Dans une lettre qu'il rédigea en 1879, il écrivit : « Je n'ai jamais été athée dans ce sens que je ne n'ai jamais nié l'existence d'un Dieu… [le terme] « Agnostique » décrirait mieux mes idées » (Darwin to J. Fordyce, publié par lui dans Aspects of Scepticism, 1883).
Les répercussions de la théorie
Les répercussions de la théorie de Darwin allaient s'avérer catastrophiques. L'athéisme et le laïcisme gagnèrent énormément en popularité. Comme l'a déclaré l'un des partisans modernes les plus acharnés de Darwin et de l'athéisme, Richard Dawkins, « Darwin a permis qu'on s'épanouisse intellectuellement en tant qu'athée » (The Blind Watchmaker, 1986, p. 6).
Le matérialisme scientifique se répandit comme un feu de brousse. Par gratitude, Karl Marx - le père du communisme - envoya à Darwin un exemplaire de son oeuvre principale sur le communisme, Das Kapital. « Bien que développé à la manière anglaise rudimentaire, écrivit-il à son collègue communiste Fredrich Engels, ce livre, en matière d'histoire naturelle, sert de base à nos idées ». À quelqu'un d'autre, il écrivit de l'oeuvre de Darwin : « Cela m'arrange bien en ce sens que cela me fournit un fondement, en science naturelle, à la lutte historique des classes » (Browne, p. 188).
Ce soutien évolutionniste allait, tout compte fait, fortement contribuer à l'établissement de l'édifice philosophique des deux fléaux du communisme et de l'athéisme en Russie, en Chine et dans de nombreux autres pays.
À mesure que les idées de Darwin gagnèrent en popularité, on se mit à remettre en question les absolus moraux. En l'absence de Créateur, tout semble permis. S'il n'y a pas de Dieu, nos actions ne semblent pas attirer la moindre conséquence. Quand il n'y a pas de plus haute autorité que soi, la raison du plus fort devient la norme ; on se dit qu'il suffit d'appliquer la loi de la jungle pour parvenir à ses fins. Seuls les plus forts survivent.
Comme pour couronner le tout, en 1871, Darwin écrivit sa « Descendance de l'homme », d'après laquelle l'homme descendrait du singe, un livre comportant des spéculations non fondées ainsi que des prétentions racistes, y compris celle de la supériorité des blancs (les blancs étant supposément de plus lointains ancêtres du singe que les noirs, dans la chaîne de l'Évolution).
Plus tard, Hitler se servit de quelques-unes de ces idées, parlant de « darwinisme social » lors de la IIe Guerre mondiale, pour éliminer des millions de Juifs et autres ethnies, sous prétexte qu'ils représentaient une race inférieure. Il disait : « La nature est cruelle ; par conséquent, nous aussi, parfois, devons l'être… J'ai le droit d'éliminer des millions [d'êtres] d'une race inférieure se reproduisant comme du venin ! … Les instincts naturels poussent non seulement tous les êtres humains à conquérir leurs ennemis, mais aussi à les détruire » (cité par Hermann Rauschning, The Voice of Destruction, 1940, p. 137-138).
En somme, Hitler pouvait prétendre appliquer la théorie de l'Évolution, ne faisant que hâter la fin inévitable des faibles. C'était nécessaire, selon lui, pour faire de la place pour une espèce mieux adaptée et supérieure. À ses yeux, cela justifiait, scientifiquement et moralement, ses idées tordues, et, en grande partie du fait de ses conceptions faussées, quelque 65 millions de personnes périrent pendant la IIe Guerre mondiale.
Des défauts dans la théorie de Darwin
À l'approche du 150e anniversaire de L'Origine des espèces, les idées de Darwin sont loin de faire l'unanimité. La croyance en Dieu, en la Création et en la Bible n'a pas disparu; bien qu'elle ait diminué.
À mesure que d'autres découvertes scientifiques sont faites, comme celles sur le génome humain de l'ADN (représentant des instructions de 3 milliards de caractères génétiques minutieusement assemblés), sur la déroutante complexité de la cellule ; en l'absence totale de formes intermédiaires entre les divers types de plantes et d'animaux, la théorie de Darwin est à bout de souffle.
« Il n'y a pas longtemps, mettons 25 ans, fait remarquer Patrick Glynn, un ancien athée, docteur en philosophie de Harvard (1997), une personne raisonnable évaluant les preuves purement scientifiques sur la question, aurait probablement penché en faveur du scepticisme. Ce n'est plus le cas. À présent, les données concrètes penchent fortement en faveur de l'hypothèse de Dieu » (God : The Evidence, 1997, p. 55-56).
Hélas, de nombreux savants ne sont guère disposés à renoncer à la théorie de l'Évolution, à cause des implications théologiques et philosophiques que cela impose.
Le biologiste de Harvard Richard Lewontin a un jour candidement admis : « Nous prenons le parti de la science en dépit de l'absurdité manifeste de certains de ses concepts, en dépit de la tolérance – de la part de la communauté scientifique – pour des histoires toutes faites mais non prouvées, parce que nous nous sommes engagés au départ à rester attachés… au matérialisme… Nous ne pouvons donc pas entrouvrir la porte et y permettre un pied divin de la bloquer » (Billions and Billions of Demons, revue new-yorkaise des livres, 9 janvier 1997, p. 31).
Où sont les preuves ?
Évidemment, ce qu'il manquait toujours à Darwin, c'étaient les preuves, les formes de vies intermédiaires entre un organisme d'une cellule et celui composé de nombreuses cellules ; entre les reptiles et les mammifères ; entre le singe et l'homme, pour n'en nommer que quelques-unes. « Comment se fait-il que chaque formation géologique et chaque strate ne soit pas saturée de ces chaînons intermédiaires ? La géologie, assurément, ne révèle pas le moindre enchaînement organique progressif détaillé ; et c'est probablement l'objection la plus sérieuse et la plus flagrante qu'on puisse avancer contre la théorie » (The Origin of Species, 1958, Mentor Edition, p. 293-294).
Que fit donc Darwin ? Il esquiva la question relative à l'absence de fossiles en disant que le registre géologique n'avait été que partiellement étudié et était incomplet. Or, à présent, d'après le biochimiste Michael Denton, 43 des 44 ordres de vertébrés terrestres ont été découverts comme fossiles (soit 97%), et aucune forme intermédiaire n'a été découverte parmi ces groupes. Pas même une esquisse de quelque chose ressemblant à un croisement entre une écaille de reptile et une plume d'oiseau, alors qu'il s'agirait de groupes de créatures supposément apparentées.
Le paléontologue Stephen Jay Gould admet : « La rareté extrême des formes intermédiaires, dans le registre des fossiles, persiste en tant que le secret professionnel de la paléontologie » (The Panda's Thumb, 1980, p. 181).
Si la théorie de Darwin est juste, il devrait y avoir des millions de formes (fossiles) intermédiaires, d'animaux et de plantes à divers stades de transformation vers d'autres espèces en mutation et par sélection naturelle. En fait, s'il y avait eu évolution, il devrait exister beaucoup plus de formes de vies intermédiaires que d'espèces définitives entièrement fonctionnelles. De plus, on devrait pouvoir observer des créatures se modifiant graduellement dans le quelque million d'espèces existant aujourd'hui sur terre et dans le nombre encore plus élevé de fossiles. Or, on n'observe rien de tel.
D'après certains rapports, vers la fin de sa vie, Darwin aurait changé d'avis, regrettant peut-être l'énorme chemin parcouru par ses idées auprès du public, acceptant même l'idée qu'on puisse être sauvé par Jésus-Christ (bien que croyant toujours en l'Évolution). Bien qu'il soit possible que cela ait été le cas, Darwin était toujours très discret au niveau de ses convictions personnelles, et personne dans sa famille ne reconnut jamais un tel changement dans ses idées, y compris sa femme qui était croyante. Pour la société, cela n'aurait vraiment rien changé, car ses disciples n'auraient pas fait marche arrière.
En guise de conclusion, les biographes Desmond et Moore décrivent (p. 677) les obsèques de Darwin dans l'abbaye de Westminster : « Cela marquait la prise du pouvoir par les commerçants du marché de la nature, les savants et leurs sous-fifres de la politique et de la religion. De tels hommes, de la haute société, payaient leurs cotisations, car Darwin avait naturalisé la Création et avait placé la nature humaine et la destinée humaine entre leurs mains. La société ne serait plus jamais la même. L'aumônier du diable avait fait son oeuvre ».