« L’Éternel, notre Dieu, est un seul Éternel »
En lisant ici que Dieu est « un seul », la plupart des juifs ont écarté, pendant des siècles, la possibilité que Jésus de Nazareth puisse être le Fils de Dieu, sur le même plan divin que Dieu le Père.
En lisant ce même verset, les théologiens catholiques primitifs eurent de la difficulté à formuler dans la doctrine de la Trinité, un Dieu comprenant le Père, le Fils et le Saint-Esprit, avec ces trois êtres qui sont distincts tout en formant un seul Dieu trine.
Comment devrions-nous interpréter ce verset alors ?
L’un des principes essentiels à la compréhension de la Bible est le fait qu’il faut tenir compte de toutes les écritures sur un même sujet. Ce n’est qu’à partir de ce moment-là que nous pourrons avoir une compréhension exacte et complète de la question.
D’autres passages bibliques nous disent clairement que deux Êtres distincts, le Père et Jésus-Christ, le Fils, sont tous deux Dieu (Hébreux 1:8 ; Jean 1:1 ; Jean 1:14). Il faut donc déterminer si le Shema décrit l’unicité numérique de Dieu ou quelque chose de tout à fait différent.
Significations multiples du mot hébreu traduit par « un »
Ceux qui étudient l’hébreu trouvent difficile le fait que cette langue possède un vocabulaire beaucoup plus limité que d’autres langues, comme l’anglais. Cela signifie qu’un seul et même mot hébreu peut avoir et a souvent de multiples significations, ce qui rend difficile la tâche de traduire cette langue avec précision.
Le mot hébreu echad, traduit par « un » dans Deutéronome 6:4, en constitue un bon exemple. Parmi ses significations, mentionnons le nombre un, mais aussi d’autres significations connexes telles que « un seul et même », « comme un seul homme, ensemble [unis] », « chaque, chacun », « l’un après l’autre » et « premier [par ordre d’importance] » (Brown, Driver and Briggs, A Hebrew and English Lexicon of the Old Testament, 1951, p. 25). Il est traduit par « le seul » dans plusieurs versions française de la Bible, y compris la Louis Segond (NEG 1979), et la version Ostervald. Comme pour de nombreux autres mots hébreux, il est préférable de déterminer la véritable signification d’un mot en examinant son contexte.
Dans ce cas, plusieurs interprétations pourraient s’avérer grammaticalement correctes et cohérentes avec d’autres énoncés bibliques.
Dans le Shema, Moïse pourrait tout simplement avoir dit aux lsraélites que le véritable Dieu, leur Dieu, devait occuper la première place — passer en premier — dans leur cœur et leur esprit. Cette jeune nation s’était libérée de l’esclavage dans un contexte culturel où les Égyptiens croyaient en plusieurs dieux, et elle était sur le point d’entrer dans un territoire où les habitants étaient ancrés dans l’adoration de nombreux prétendus dieux et déesses de la fertilité, de la pluie, de la guerre, des voyages, etc. Par la bouche de Moïse, Dieu avertit sévèrement les lsraélites des dangers que représentait l’adoration d’autres dieux que Lui.
Cette interprétation — selon laquelle Dieu doit avoir la priorité absolue chez les lsraélites — est solidement étayée dans le contexte. Au verset suivant, Moïse poursuit ainsi : « Tu aimeras l’Éternel, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force. »
Ce passage est au cœur d’une discussion échelonnée sur plusieurs chapitres quant aux avantages et aux bénédictions qui se rattachent à l’adoration sincère de Dieu et à l’évitement des pratiques idolâtres des habitants qui devaient être expulsés de la Terre promise. Jésus Lui-même cita Deutéronome 6:4-5 comme étant le « grand commandement, le premier » de la loi (Matthieu 22:36-38 ; Marc 12:28-30).
Le mot hébreu echad traduit par « seul » s’intègre aussi très bien dans ce contexte. Autrement dit, le véritable Dieu et Lui seul devait être le Dieu d’Israël, et les lsraélites ne devaient adorer aucun autre dieu.
Cette interprétation pourrait très bien être celle d’un scribe ayant entendu Jésus citer le verset mentionné dans Marc 12:29-30. Le scribe répondit ceci au verset 32 : « Bien, maître ; tu as dit avec vérité que Dieu est unique […] [heis, en grec, ce qui correspond à echad dans bon nombre de ses significations], et qu’il n’y en a point d’autre que lui […] » — ce qui semble indiquer ce que le scribe comprit en entendant le mot « heis » dans cette expression (soit « le seul ») (Marc 12:32).
Cela ne signifie pas que Jésus-Christ ne pouvait être Dieu aux côtés du Père. Au contraire, il n’y a aucun autre Dieu à part le vrai Dieu — autrement dit, en dehors de la famille divine ou du « type » divin qui comprend maintenant deux Êtres divins, le Père et le Fils. En bref, la famille divine seule est Dieu.
Une autre perspective du Shema est basée sur le mot racine duquel le mot echad est dérivé — achad. Ce mot signifie « unifier » ou « aller dans un sens ou dans l’autre » (Strong’s Exhaustive Concordance of the Bible). Autrement dit, echad peut également signifier « à l’unisson » ou « un groupe uni comme un seul homme ».
Exemples où « un seul » peut désigner « un groupe »
Dans plusieurs versets, echad signifie clairement « plusieurs personnes unies dans un groupe ». Dans Genèse 11:6, Dieu dit ceci de ceux qui construisaient la tour de Babel : « Voici, ils forment un seul peuple [echad]. » Dans Genèse 2:24, Il dit : « C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère, et s’attachera à sa femme, et ils deviendront une seule [echad] chair. »
Lorsque nous lisons au sujet d’un grand groupe de personnes ou d’un homme et d’une femme qui deviennent une seule chair dans le mariage, nous comprenons que plusieurs personnes entrent en ligne de compte. Nous ne supposons pas que des personnes distinctes sont devenues un seul être physique, même si elles sont unies par l’esprit et qu’elles ont le même objectif.
Dieu le Père et Jésus-Christ le Fils sont évidemment d’un même esprit et ont le même objectif. Jésus dit ceci au sujet de Sa mission : « Ma nourriture est de faire la volonté de celui qui m’a envoyé, et d’accomplir son œuvre » et « […] je ne cherche pas ma volonté, mais la volonté de celui qui m’a envoyé. » (Jean 4:34 ; Jean 5:30)
Jésus décrit Leur relation en ces termes : « Moi et le Père nous sommes un. » (Jean 10:30) Le Christ pria pour que Ses disciples, de l’époque et à venir, soient également d’un même esprit et aient le même objectif, tout comme Lui et Son Père : « Ce n’est pas pour eux [ces disciples] seulement que je prie, mais encore pour ceux qui croiront en moi par leur parole, afin que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et comme je suis en toi, afin qu’eux aussi soient un en nous […] » (Jean 17:20-21). On trouvera plus de détails sur l’unicité de Dieu tout au long du présent chapitre.
Quelle que soit la traduction que nous acceptions — « […] l’Éternel, notre Dieu, est un seul Éternel » ou « L’Éternel, notre Dieu, est le seul Éternel » — aucune d’entre elles ne limite Dieu à un seul Être. Et à la lumière de ces Écritures bibliques et d’autres passages, il est clair que Dieu est une pluralité d’Êtres — une pluralité qui œuvre à l’unisson. Autrement dit, Dieu le Père et Jésus le Fils forment une famille parfaitement unie.